« L’effet sans nom »

“L’effet sans nom”: l’anonymat dans les pratiques de la psychologie

Chapitre à paraître dans
M. Cazenave (sld) Psychologie, idéologie et philosophie.
Cette anecdote m’a été rapportée par une psychothérapeute, alors que nous évoquions la problématique du secret en psychothérapie. Une de ses amies, psychanalyste, avait décidé de publier, sous la forme d’un article dans une revue clinique, le cas d’une de ses patientes. Pour préserver l’anonymat de celle-ci, elle avait transformé quelques-unes des caractéristiques de cette patiente. Et notamment son sexe : elle reconstruisit le cas comme s’il s’agissait d’un homme. Est ce que cette patiente suivait avec intérêt les productions de sa thérapeute ou est ce qu’elle avait l’habitude de lire les revues cliniques, toujours est-il qu’elle retrouva son cas, et qu’elle n’eut pas trop de mal, malgré cette transformation majeure, à se reconnaître. C’est ainsi qu’au cours des séances suivantes, notre thérapeute dut travailler, avec sa patiente, la difficile question que celle-ci lui amenait dans la consultation : pourquoi diable sa thérapeute croyait-elle donc qu’elle était un homme?
Ce type d’histoire risque aujourd’hui de se multiplier, quoique sous des formes sans doute moins humoristique. Ce que les psys disent de leurs patients intéresse de plus en plus ces derniers. Et cet intérêt trouve aujourd’hui des moyens de plus en plus nombreux de se satisfaire : en témoigne le fait que  cette patiente n’ait eu aucune peine à retrouver les écrits de sa thérapeute. Ceci évidemment risque d’entraîner les thérapeutes dans une surenchère de leurres, de transformations, afin que les patients ne puissent se reconnaître — voire, à la limite, les mener à s’abstenir d’écrire, ce qui rendrait la transmission et le partage des savoirs un peu compliqués ; ou de rendre les cas tellement éloignés de la réalité qu’on pourrait se demander si une fiction ne ferait pas aussi bien l’affaire.
La question de l’anonymat, ce que j’appelle « l’effet sans nom » atteint donc aujourd’hui une limite prodigieusement intéressante.

 

 

 Car, on le voit, il ne s’agit plus seulement de protéger le patient afin qu’il ne soit pas reconnu par d’autres, mais de protéger finalement les secrets du thérapeute par rapport à son patient. Faute de quoi, celui-ci pourrait venir demander des comptes ; faute de quoi également, si la thérapie est toujours en cours, et je prolonge ici une remarque de Thierry Melchior dans « Guérir par la vérité »[1] le court-circuitage de la découverte compromettrait la guérison en ne respectant pas le timing ; ou faute de quoi encore, en suivant cette fois Mikkel Borch Jakobsen[2], le thérapeute pourrait être légitimement suspecté d’avoir transgressé le pacte d’ignorance qui protège le patient des demandes du thérapeute.
 On pourrait par ailleurs se demander si la fonction de l’anonymat ne s’articule pas à celle qui a déjà été soulignée, à propos du secret et de l’éthique de la confidentialité, dans le cadre des psychothérapies et plus largement de la médecine : protéger les professionnels. C’est en effet à cette conclusion qu’aboutissent, quoique par des chemins très différents, l’anthropologue des pratiques autour de la folie, Robert Barrett, dans sa « Traite des fous »[3] et le sociologue de la médecine, Jean Peneff, au chapitre consacré au secret médical dans sa « France malade de ses médecins »[4]. Je ne reprendrai pas ici leurs critiques pour ne garder que le fil commun qui à la fois lie leur analyse et s’articule à la question de l’anonymat[5] : l’éthique de la confidentialité, la pratique du secret ont — notamment[6]— pour enjeu de protéger l’autonomie du professionnel, de prévenir la possibilité de critiques externes, c’est-à-dire, comme l’écrit Peneff, de tenir à distance respectueuse les profanes.
On ne peut l’ignorer, cette pratique de l’anonymat n’est pas le seul fait des pratiques de soin. On la retrouve par exemple dans les enquêtes de la psychologie et de la sociologie. Et le même motif peut être opposé à toute remise en question de cet usage: il s’agit de protéger les gens qu’on interroge. On se garantit du même coup une certaine « vérité » du discours, une certaine authenticité du témoignage : les gens auraient peut-être peur des conséquences de ce qu’ils pourraient dire, et donc cacher des choses à l’enquêteur, voire lui mentir, en fonction de ces conséquences. Le vieux rêve positiviste d’une vérité non parasitée par les conditions de l’enquête et l’impératif de la déontologie se renforcent ici mutuellement, au point de détourner l’attention des enjeux qui sous-tendent ou qui accompagnent ces choix de pratiques. Car le « tenir à distance les profanes » qui constitue un des enjeux de l’éthique de la confidentialité dans les pratiques de soin me semble également à l’œuvre ici. Mais cette nécessité ne joue pas tellement vers l’extérieur, elle se trame surtout à l’intérieur de la relation entre l’enquêteur et l’enquêté. Pour le dire simplement : la pratique de l’anonymat distribue les expertises et construit, induit ou effectue l’asymétrie des rôles.
Ce qui m’apparaît aujourd’hui comme une évidence ne s’est cependant pas imposé d’emblée comme une conséquence logique des analyses critiques que j’adresse aux praticiens des sciences humaines. C’est parce que l’anonymat s’est avéré, dans des circonstances particulières, comme un véritable problème qui me mettait en difficulté que j’ai commencé à mettre en doute les impératifs qui guident généralement les recherches. A l’origine de cette histoire, il s’agissait de mener une enquête. Celle-ci s’est avérée, d’entrée de jeu, très difficile. Nous devions, la sociologue Antoinette Chauvenet et moi-même, évaluer les effets d’un programme thérapeutique de soutien aux familles de réfugiés dans des camps de la région  de Split, en ex-Yougoslavie. La guerre n’était pas terminée, et les conditions de vie dans les camps, nous nous en rendions compte, semblaient inexorablement prolonger le travail de destruction. Et j’en étais souvent à me demander si cette enquête elle-même ne participait pas à ce processus. Je crains qu’à certains égards, du moins à ses débuts, cela n’ait été le cas.
Toujours est-il que je tentais désespérément de trouver une solution à ce problème.
Commençons, ici encore, par une anecdote, intéressante dans la mesure où elle rend particulièrement visible une partie des présupposés, des réflexes professionnels in-questionnés qui sont liés à cette pratique du secret.
Quand j’arrivais, avec ma traductrice, chez la famille qui m’attendait (les thérapeutes du programme avaient expliqué aux familles en quoi consistait notre travail et nous avions des rendez-vous dans les appartements qu’elles occupaient), il y avait généralement du monde : des voisins, des amis du lieu d’origine, des cousins étaient là, parfois très nombreux. Et l’on attendait, avant de commencer l’entretien. Et parfois on attendait longtemps  que tous ces gens s’en aillent. Et ces gens restaient. Il m’a fallu du temps pour comprendre le malentendu. Pour moi, formée comme psychologue — mais une sociologue aurait eu le même réflexe— il était évident qu’au vu de ce que nous allions aborder, le cadre se devait d’être intime et confidentiel. On allait parler de malheur, de pertes, de tristesse, de relations, bref de toutes ces choses qui font partie de ces sphères délicates de ce que nous considérons comme l’intimité. Et je ne m’étais évidemment pas posé la question de savoir si les gens que j’allais rencontrer définissaient les choses comme je le faisais, ce qui, de toute évidence n’était pas le cas (mais ce genre d’évidences face aux plis professionnels ont peu de chance de s’imposer rapidement). Les voisins, amis, famille élargie n’étaient pas là par hasard. S’il étaient là, c’était justement en raison de ma venue. Le malaise finissait par s’installer, et je dois à la sensibilité de ceux qui m’accueillaient d’avoir finalement traduit que visiblement, c’était moi qui avais besoin d’intimité pour travailler. Ce qui me semble intéressant aujourd’hui, c’est de penser que cette traduction si pertinente ne m’a pas effleurée à cette époque. Et si je suis, à un moment arrivée à changer la manière dont je concevais la pratique, c’est par de tout autres voies, très empiriques. Ce que je vais à présent vous relater est un des multiples événements qui ont concouru à ce changement.
J’étais ce jour-là à l’ancienne fabrique d’Omis, près de Split, fabrique dont les logements avaient été réquisitionnés pour les personnes réfugiées. Je me trouvais face à un monsieur d’une soixantaine d’années, un agriculteur musulman originaire de Bosnie — un village proche de Travnick. Un monsieur magnifique avec une chevelure blanche éclatante et des yeux bleus plus éclatants encore. Nous avions accompli presque toutes les étapes : je m’étais présentée, je lui avais garanti l’anonymat et nous avions abordé les sujets qui guidaient mon enquête. Je me trouvais face à lui et je notais soigneusement dans mon cahier ses propos, traduits par la traductrice Tatiana. Il me parlait, à ce stade de l’entretien, de la disparition de son frère.
A ce moment, il a saisi le stylo que je tenais pour me dire : « Vous voyez, voilà ce que nous avons été. Vous pouvez prendre ce stylo et écrire avec. Ceux qui font de la politique ont écrit avec nous. Ils n’ont pas pris leurs fils pour jouer avec et les envoyer à la guerre. Ils ont pris nos fils et ont écrit la guerre avec eux. Nous ne sommes qu’un grain de poussière dans cette histoire ». Il s’est tu. Et je n’ai pu que me taire et j’ai vu que Tatiana était aussi perplexe, aussi émue que moi. Que faire de ses mots magnifiques ? Qui oserait copier les mots d’un poète en annonçant simplement « un poète a dit » ? Ce qu’a fait ce monsieur est un acte de résistance : prendre mon stylo n’avait rien d’anodin ; il résistait très poliment, très gentiment, en me laissant le loisir de le comprendre, à ce que je lui proposais, à la posture de sujet d’enquête.
Car en subordonnant mon enquête à l’anonymat, je choisissais implicitement de privilégier certaines choses, certains régimes de discours ; des choses qui doivent rester « couvertes » plutôt que des choses dont on peut être fier, et qu’on aurait envie de signer.
Alors je lui ai expliqué : « vos mots sont tellement beaux qu’ils ne peuvent pas m’appartenir. Nous avons fait toute notre recherche dans l’anonymat de ceux que nous interrogions, parce que nous pensions que cela pourrait leur donner confiance et les protéger, et je me pose aujourd’hui la question de savoir si nous avons bien fait. Nous avons voulu protéger ceux qui témoignent, mais je pense que nous aurions dû laisser choisir, et laisser la question ouverte. Nombre de ceux que j’ai rencontrés nous ont dit que le sentiment de perte de la dignité était amplifié par le fait qu’on les appelle, tous, « vous, les réfugiés », comme une masse anonyme marquée une identité qu’ils n’ont pas choisie, et dans laquelle ils ne peuvent s’inventer. Et nous n’avons pas su prendre au sérieux ce qu’ils nous disaient, à chaque fois que nous écrivions, dans l’anonymat de nos interviews : « un réfugié m’a dit ». Je pense que nous aurions dû réfléchir avec chacun à la question de l’anonymat, et que nous allons dorénavant devoir le faire. C’est avec vous que je l’ai appris ». Il a repris le stylo, a regardé ma page tendue, puis y a écrit son nom : Jahija Smajié.
La question de l’anonymat protecteur, qui ne s’était jamais posée, s’est avérée à ce moment-là comme une question que nous avions clôturée trop vite. Une question clôturée sur le mode du secret qui séparait : les choses dont on a honte et les choses dont est fier (et qui doivent rester à l’extérieur) ; les réfugiés des professionnels (moi, j’avais bien un nom qui allait s’inscrire dans des rapports, des articles et ultérieurement dans un livre[7]). Cette question, il me fallait apprendre à la poser, à la négocier, et à en négocier les risques avec ceux que j’interrogeais. Le risque que je pensais devoir éviter n’était qu’un des risques possibles —celui de divulguer—, mais il m’empêchait de prendre en compte l’autre risque, celui auquel je me confrontais à ce moment-là avec Jahija Smajié , le risque de « séparer », d’isoler, de faire parler tout en faisant taire, de voler les paroles ou de les retirer à celui qui parle. Le risque de faire renouer le secret avec son étymologie: secretus, séparer, isoler.
On comprend à présent pourquoi je pouvais lier ces deux histoires : mon incompréhension face au fait que les gens auxquels je m’adressais aient pu inviter leurs amis et familles à assister à la rencontre, et le fait que la question de l’anonymat s’était imposée comme un incontournable ou un inquestionnable de la recherche. L’effet « sans nom » était particulièrement dramatique dans ces circonstances, puisque, d’une certaine manière, l’anonymat prolongeait ce qu’on pourrait appeler un régime d’insulte — « vous les réfugiés »— un régime d’insulte d’autant plus violent que le fait d’être nommé ou considéré comme réfugié était vécu par les gens comme extrêmement disqualifiant — je les cite : quelqu’un d’indigne, personne, personne de troisième zone, quelqu’un de l’autre versant du monde.
Si donc cet effet est particulièrement terrible dans ces circonstances, il nous oblige néanmoins à réfléchir à ce qu’il peut produire dans les situations, certes moins dramatiques, de recherche.
Ouvrons par ce qui a toutes les apparences d’un paradoxe : l’anonymat crée l’identité. Voilà ce que je nommerai ici « l’effet sans nom » : c’est en effaçant le nom que se crée la position de « sujet » d’une enquête — j’entends ici « sujet » dans le sens où la psychologie les désigne, c’est-à-dire un « quiconque » défini par sa position de profane dans une expérience. En d’autres termes, c’est en effaçant le nom que se construit l’asymétrie entre le profane et l’expert, c’est en effaçant le nom que se construit la posture particulière de celui qui devra assumer le rôle d’enquêté face à celui qui se définit dans le même geste comme expert. En quelque sorte, l’anonymat joue comme élément essentiel du dispositif sous la forme d’une induction qui déborde largement celle d’un « soyez libre de dire tout ce que vous voulez » voire d’un « parlez sans crainte » qui se donne comme motif: soyez libre, en effet, vos paroles n’auront aucunes conséquences. Il suffit de réfléchir deux secondes à la manière dont les gens peuvent se percevoir et traduire la situation lorsqu’on leur dit que leurs paroles n’auront aucune conséquence.
Qu’on ne se méprenne pas, je ne suis pas en train de conduire un plaidoyer individualiste ou humaniste d’exigence de reconnaissance des « sujets » cette fois au sens de « subjectivité »(comme les psys disent « on a oublié le sujet ») : il s’agit d’une position pragmatique et épistémologique. Question pragmatique et épistémologique donc ; voici l’effet des pratiques sans nom : elles sont toujours au risque de mettre les gens dans des situations où ils ont peu de chance d’être intéressants, et peu de chance d’être intéressés.
On peut d’ailleurs se demander si les dispositifs ne visent pas justement, ou plus modérément dit, ne se satisfont pas du fait que les gens ne soient pas trop intéressés, ou ne s’autorisent pas à l’être.
Si je reprends ce qui nous est arrivé, ce jour-là dans cette chambre d’Omis, je peux esquisser le fil qui pourrait conduire à cette analyse. En traduisant le geste de monsieur Smajié comme un acte de résistance, et en le liant au malentendu qui me faisait croire que la présence des voisins et des amis était un événement fortuit et parasitaire, je dresse en fait un contraste entre deux types de dispositif. Dans le premier, je constitue d’emblée l’identité de ceux auxquels je m’adresse : je me situe dans un dispositif de révélation (que j’essaie de protéger en le fermant) dans lequel je demande aux gens de témoigner  de leur « vécu » (ce sont les mots qu’on utilise).  Ce que monsieur Smajié me proposait, avec son acte de résistance, c’était de changer de dispositif : raconter les cauchemars et la tristesse le remettait, le bloquait dans une identité inacceptable, celle de victime ; il me proposait de penser ensemble. Il ouvrait le champ des questions, au sens littéral puisqu’il me proposait de passer d’une histoire personnelle à l’histoire d’un collectif. Non plus voilà ce qui m’est arrivé, mais voilà ce qui nous est arrivé.
J’avais signalé, au début de ce récit, le malaise profond avec lequel je menais cette enquête : je sortais souvent de chez les gens en ayant eu l’impression de participer au processus qui les faisait aller de plus en plus mal. Pas cette fois-là. Et les « pas cette fois-là » se sont d’ailleurs multiplié au fur et à mesure que j’avançais et que j’apprenais à chercher la bonne occasion pour recréer cette situation. Chercher le moment où l’on commence à penser ensemble. Un bricolage incessant. Mais qui portait ses fruits : les gens nous remerciaient, non plus d’avoir prêté attention à leur sort, mais de leur avoir donné, pendant le temps de la visite, l’impression qu’ils avaient été autre chose que des réfugiés. Et la fin des visites, dans ces cas-là, se déroulait de manière joyeuse.
Je suggère que nous nous tournions à présent vers la psychologie de laboratoire. Je vous proposerais de suivre l’hypothèse qui a jusqu’à présent guidé mon parcours. Pour les pratiques de l’enquête, je me suis appuyée sur un contraste : qu’est ce que cela change, dans une pratique, de décider que la personne ait ou non un nom ? Pour évaluer cet effet, en psychologie, je proposerais de partir d’un contraste existant ; celui entre des pratiques qui se sont adressées à des « sujets » et des pratiques qui ont monté leurs expériences en recrutant des experts compétents : ceux-ci avaient un nom.
Un autre contraste recoupe celui-ci et d’ailleurs se calque sur lui : dans les premiers dispositifs, la production des effets de vérité se subordonne au mensonge, c’est-à-dire à l’ignorance des sujets. Les seconds semblent échapper à cet impératif.
Cette impératif d’ignorance a été bien analysé par de nombreux auteurs, et notamment par Mikkel Borch Jakobsen, lorsqu’il rapproche, de manière intéressante le « pacte d’ignorance »[8] qui régit la psychanalyse, la demande d’inconscient de l’hypnose, et le mensonge à l’œuvre dans les pratiques de la psychologie expérimentale : il s’agit dans chacun de ces cas de « protéger le thérapeute ou le psychologue contre l’accusation de contaminer ses données, pour empêcher que celles-ci n’apparaissent comme le fruit d’une interaction entre le sujet et l’expérimentateur, le patient et le thérapeute. »[9] On peut cependant se demander si d’autres enjeux ne sont pas en même temps à l’œuvre, non pas comme des motifs explicites, mais en tant qu’ils favorisent l’inquestionnabilité du pacte d’ignorance qui régit nombre de dispositifs de la psychologie expérimentale.
Dressons notre contraste pour commencer. Celui-ci nous ramène aux origines de la psychologie expérimentale, en 1875. Au laboratoire de Wundt, la pratique du mensonge est quasiment absente. Je ne sais pas exactement jusqu’où il faut prolonger cette période, toujours est-il que je retrouve des caractéristiques très similaires dans les expériences qu’à menées le psychologue allemand Oskar Pfungst, aux environs de 1904. Pour rappel, Pfungst est ce psychologue qui a tenté d’élucider, au moyen de dispositifs expérimentaux, le mystère de Hans, le cheval qui arrivait à résoudre des opérations mathématiques compliquées[10]. Les choses sont cependant un plus compliquées dans le cas de Pfungst, puisque, nous allons le voir, dans certaines expériences, les sujets connaissent les tenants et aboutissants de l’expérience, dans d’autres, Pfungst leur cache soigneusement.
En revanche, dans l’expérience de Tamara Dembo, en Allemagne en 1930, les choses sont bien tranchées : le dispositif n’est construit que sur un leurre[11]. Les sujets sont recrutés pour subir, leur prétend Dembo, une épreuve d’adresse assez compliquée. Tellement compliquée d’ailleurs qu’elle est impossible à réaliser : ceci mènera les sujets à se mettre en colère, à se fâcher, voire à menacer de claquer la porte ou d’étrangler la perverse expérimentatrice. La colère, en fait, constituait le véritable objet de l’expérience. Rappelons au passage quelques-unes des expériences les plus célèbres, depuis les pseudo apprentissages par l’électricité chez Milgram[12], les expériences sur l’influence sociale (un sujet doit porter des jugements en comparant des longueurs de lignes, et se trouve avec des gens au jugement complètement aberrant—ce sont évidemment des complices de l’expérimentateur) ; ou encore celles sur l’altruisme jonchant les rues de pseudo-victimes appelant les malheureux sujets à leur secours.
Comment comprendre que Wundt n’ait pas cru nécessaire de se plier à cette pratique du mensonge et de l’insu ? Il ne faudrait pas en conclure trop vite que l’angoisse méthodologique serait le produit d’un effort croissant, et plus tardif, de réflexivité ou de scientisme chez les psychologues. N’en concluons pas non plus que le problème des attentes de l’expérimentateur n’aurait émergé qu’ultérieurement. Pfungst, pour revenir à lui, connaissait très bien le phénomène des attentes de l’observateur puisque ce sont justement elles qu’il rendait responsables des prétendues compétences de Clever Hans le cheval. Pour rappel, Hans répondait aux questions arithmétiques qui lui étaient posées en martelant le sol de son sabot. Or, ce que Pfungst découvre — ou plutôt vérifie[13] — en tentant d’élucider les origines de ce talent quelque peu miraculeux, c’est que les personnes qui interrogeaient le cheval envoyaient, sans s’en rendre compte, les signaux permettant à ce dernier de savoir quand il devait cesser de marteler. Pfungst va mettre son hypothèse à l’épreuve de diverses manières : il va demander à des sujets d’interroger le cheval, afin d’observer ce phénomène de l’influence des attentes ; il va également lui-même jouer le rôle du cheval face à des sujets, et tenter d’acquérir les mêmes talents à deviner, dans les mouvements imperceptibles que ceux-ci effectuent à leur insu, le nombre qu’ils ont en tête. Or, ces expériences, je l’ai brièvement signalé, sont tantôt sous le régime de l’insu, tantôt pas : les sujets, dans ce cas, savent ce qui est attendu de l’expérimentation, il leur est demandé d’être vigilant par rapport à l’influence de ces attentes.
Les raisons de ce contraste entre insu et explicitation sont visibles si on prend en compte la manière dont sont organisées les expériences, tant chez Pfungst que chez Wundt.
Chez Wundt, d’abord, il est nécessaire de rappeler la teneur des expérimentations, elle a de l’importance. Wundt, en fondant la psychologie expérimentale, veut calquer celle-ci sur la physiologie.  Il lui faut des lois, en l’occurrence de la causalité psychique, sa méthode consistera à les trouver en mettant à l’épreuve, comme le fait la physiologie expérimentale, des « effets ». L’objet privilégié sur lequel porte cette enquête des effets sera hérité quant à lui de la tradition philosophique : c’est la conscience. On étudiera ainsi l’effet de telle stimulation sur tel mécanisme psychique, comme la perception de différence de luminosité ou de poids. La conscience s’exprime par des temps de réaction, des différences de perception (par exemple de la luminosité en fonction de la surface), elle donne lieu à des équations traduisant par des fonctions des phénomènes comme la perception de différences de poids[14]. L’introspection cependant reste la voie privilégiée pour explorer cette conscience : elle doit venir compléter les données ainsi obtenues. La personne qui a effectué les discriminations, qui a produit les réactions, bref, ce que nous appelons aujourd’hui le sujet doit dans la seconde phase de l’expérience, relater la manière dont ces sensations, perceptions, réactions, ou discriminations se sont produites[15].
Mais ce qui apparaît comme beaucoup plus exotique pour nous aujourd’hui, c’est la manière dont les expériences s’organisaient. Il n’y avait à proprement parler pas de sujet, au sens contemporain de la psychologie — on ne les appelait d’ailleurs pas comme cela. Et c’est là que réside le véritable enjeu à la fois des pratiques du mensonge et des pratiques qui font des sujets des « quiconque » : des effets de « sans nom ».
Dans le laboratoire de Wundt, les positions de sujet et d’expérimentateur étaient totalement interchangeables. Du fait que recherche et enseignement étaient étroitement liés dans les universités allemande, chaque étudiant était en même temps chercheur et travaillait en collaboration avec ses condisciples et ses maîtres. Chacun menait son expérience et participait à celle des autres. Chaque chercheur pouvait dès lors adopter, d’une expérience à l’autre, tantôt la position d’expérimentateur, tantôt celle que nous appelons « sujet », rôle qui recevait à cette époque, le joli nom d’observateur. Le fait qu’on ne désigne pas « la source humaine de données » par le nom de « sujet » n’est pas sans importance. Appeler « sujet » celui qui participe à une expérience implique beaucoup de choses. Le terme traduit une distribution très singulière et très asymétrique de l’expertise et des rôles. J’ai retrouvé, à titre d’exemple,  dans un passage de l’expérience de Tamara Dembo (l’expérience qui veut mettre les sujets en colère) cette réponse très significative de l’expérimentatrice à un sujet qui, trouvant l’expérience absurde, veut s’en aller : « Vous êtes le sujet, vous devez continuer ». Et cette réponse suffit à remettre les choses en place.  Mais rares sont justement les sujets qui s’autorisent à dénoncer l’absurdité d’une expérience : le terme « sujet » joue comme une induction dès le début.
Retour à Wundt, on voit, plus étonnant encore, que les positions de sujet et d’expérimentateur ne sont même pas rigidement fixées en fonction du responsable d’une recherche donnée, puisqu’il arrive que le signataire d’un article ait en fait joué le rôle de « sujet » de l’expérience. Il avait simplement délégué à d’autres le soin de conduire l’expérimentation. Wundt lui-même choisissait toujours pour lui-même le rôle de sujet, même lorsqu’il testait ses propres théories. Pourquoi ne prenait-il pas la place de l’expérimentateur ?
C’est ici qu’on peut commencer à comprendre la véritable portée du contraste que j’essaie de construire : Wundt prenait le rôle du sujet simplement parce que ce rôle exigeait beaucoup plus de sophistication psychologique, de compétence, d’expertise que ce que ne demandait le rôle d’expérimentateur ! L’expertise, dans ce type de dispositif, intervient à plusieurs niveaux, non seulement dans la capacité à percevoir, à discriminer, à réagir, mais elle intervient aussi dans un moment crucial de l’expérience : celui de l’introspection, moment au cours duquel le sujet relate méthodiquement tous les événements de conscience qui ont accompagné la perception, la discrimination, …. Le fait de pratiquer ces expériences avec des « experts » de talent constituait donc l’assurance que les observations avaient été effectuées avec le soin requis, par des personnes qui pouvaient en garantir la crédibilité scientifique. Ces experts-collègues travaillaient ensemble dans un régime totalement différent de celui que nous connaissons — aujourd’hui caractérisé par une radicale asymétrie des expertises— : ils étaient dans un régime de confiance, pourrait-on dire. Plus intéressant encore, le nom des « sujets » figurait dans le contenu de l’article, parce que justement cette mention prenait toute son importance : un sujet de talent était une garantie supplémentaire de la crédibilité du travail.
Le contraste que je remarquais chez Pfungst, mêlant les deux pratiques, peut alors s’expliquer. Lorsqu’il a affaire à des « quiconque », les enjeux de l’expérience sont cachés ; lorsqu’il a affaire à des sujets de talent, ses étudiants en philosophie travaillant avec lui, il s’autorise à mener sa recherche sans le pacte d’ignorance. Et si les premiers sujets ne sont nommés que par la première lettre de leur nom (Mademoiselle S.), les seconds en revanche sont explicitement désignés : Chaym, von Manteuffel, Schumann, Von Allesch et Koffka — certains d’entre eux d’ailleurs, se « feront » ultérieurement un nom, en témoigne le fait qu’on peut les retrouver dans les dictionnaires de la psychologie.
L’insu, comme l’anonymat, entrent donc au laboratoire lorsque des sujets profanes y sont conviés. Et c’est dans la convergence de cette double apparition que les enjeux me semblent se nouer.  L’insu et l’anonymat se constituent dans un  rapport au profane. Ce sont des techniques qui reflètent et actualisent l’asymétrie de l’expert et du profane.
Ces techniques, en fait, traduisent surtout une difficulté que rencontre la psychologie comme champ de savoir : son expertise peut toujours être contestée. On ne peut le manquer, l’histoire de la psychologie est jalonnée de revendications à un savoir spécifique, dégagé des savoirs populaires. Nombre de ses manuels commentent d’ailleurs, dans leur introduction, l’incohérence de ces savoirs en donnant en exemple moult citations de la sagesse populaire toutes en contradiction les unes avec les autres.
On pourrait rétorquer que cette volonté de rupture avec les savoirs non-scientifiques a marqué l’histoire de la plupart des sciences— la chimie avec l’alchimie, l’astronomie avec l’astrologie, … La psychologie, cependant, rencontre une difficulté supplémentaire lorsqu’il s’agit, plus largement, de se démarquer des savoirs pratiques : la relation qu’elle entretient avec ces derniers n’est pas la même que ceux que l’on peut trouver entre la biologie et l’élevage, la physique et la navigation, la chimie et la cuisine. Ce sont des savoirs pratiques non théorisés ; il n’y a pas de proximité menaçante — comme l’écrit Isabelle Stengers, l’astrologue ne hante pas l’astronome[16]. En revanche, la mise à distance du profane s’avère d’autant plus impérieuse en psychologie que  la psychologie de sens commun est elle-même une théorie, ou sans doute un ensemble de théories reliées.
Cette proximité, vécue comme menaçante, des expertises des professionnels et des amateurs, va induire une réponse assez radicale de la part des psychologues : en s’adressant à ceux qu’ils interrogent de manière à les priver de toute possibilité de faire appel à ce répertoire de théories qui pourraient leur être commun (redéfini dans certaines circonstances comme croyances ou représentations), ils assurent de fait la stricte séparation des savoirs. Une procédure peut garantir cette « purification » tout en définissant le privilège des expertises : celle qui consiste à créer l’asymétrie entre le chercheur et celui qui sera appelé, du terme qui signe l’asymétrie, le « sujet ».
Et tout dans le dispositif va jouer comme une induction à ce rôle : le fait de s’appeler « sujet », le fait de l’insu — comment le sujet pourrait-il prendre position par rapport à la question puisqu’il l’ignore ?— et le rappel fondamental de l’asymétrie profane-expert que constitue le fait d’être sans nom. Un « quiconque » sans expertise et qui n’est là que pour faire ce qui lui est demandé en prétendant ignorer qu’il le fait parce que cela lui est demandé. Qu’est-ce qu’en somme un sujet ? C’est un être fabriqué et purifié par un dispositif de psychologie, c’est-à-dire par un dispositif de pouvoir organisant la démarcation des savoirs.
Il ne s’agit pas de dénoncer, il s’agit de chercher des solutions concrètes. Chercher des sujets de talent, certes, mais surtout chercher les gens là où ils ont du talent. C’est ainsi que je cherche. J’expérimente. Et je pratique l’enquête comme une expérimentation sur la création d’intérêts, si je peux m’inscrire dans ce que Dewey proposait. En changeant parfois simplement les questions. Ainsi, plus de dix ans après  ma rencontre avec Monsieur Smajié, j’explore les dispositifs de rencontre qui redistribuent l’expertise et qui créent de l’intérêt. Ma dernière enquête auprès d’éleveurs, en collaboration avec la spécialiste de ce domaine, Jocelyne Porcher expérimente de nouvelles manières de faire. Au lieu de leur demander « pouvez-vous nous décrire la manière dont vos animaux prennent une part active au travail ? » qui était à l’origine ce que tentait d’évaluer notre recherche, nous avons décidé de nous adresser à eux autrement, en leur proposant : « A votre avis, si nous voulons poser cette question aux éleveurs, comment devrions-nous la poser pour qu’elle ait une chance ? » Ce qu’il s’agit d’apprendre, pour nous, ce sont les bonnes questions. Il s’agit surtout de nous mettre nous-mêmes dans une situation d’apprentissage, en redistribuant l’expertise non seulement quant au contenu, mais quant à la manière même d’interroger ces contenus. Comment pourrions-nous espérer constituer un savoir intéressant si nous ne pouvons trouver la manière dont ces questions peuvent — ou non— intéresser ceux à qui nous nous adressons ? Ou plus précisément, ne nous offrons-nous pas une meilleure chance en explorant la manière dont nos intérêts peuvent se construire ? C’est là que nous retrouvons le fil pragmatique que j’ai suivi pour reconstruire cette histoire : que pourrait bien valoir un savoir s’il n’ajoute au monde et à ceux qui le composent, un peu plus d’intérêt[17] ?


[1] In Tobie Nathan, éd. La guerre des psys. Manifeste pour une psychothérapie démocratique. Paris : Les Empêcheurs de penser en rond, 2006, 65-100.
[2] « L’inconscient simulé » in T. Nathan, op. cit., 31-64.
[3] La Traite des fous. La construction sociale de la schizophrénie. Paris : Les Empêcheurs de penser en rond, 1998.
[4] Paris : Les Empêcheurs de penser en rond, 2005.
[5] Je renvoie, pour une discussion plus approfondie de ces critiques, à ma contribution à La guerre des psys (op.cit.) : « Le secret est une dimension politique de la thérapie », 153-178. Par ailleurs, on pourrait me reprocher de confondre secret et anonymat : l’anecdote relatée plus haut illustre la manière dont ce lien peut être construit : il n’y a de secret que dans l’anonymat ; seul l’anonymat, dans ce cadre, « préserve » (en principe) le secret puisque le cas est présenté de manière suffisamment claire pour être reconnu par la patiente. On verra un peu plus loin comment ces deux termes peuvent être articulés d’autres manières.
[6] Chacun de ces auteurs montre que le secret répond de fait à une multiplicité d’enjeux, ce qui mène Peneff à parler plutôt « des secret médicaux » : « Une tradition incontournable — celle de la confidentialité médicale— (mais dont l’auteur va rapidement montrer la facilité avec laquelle elle a toujours été allègrement contournée dans l’indifférence générale) s’est donc transformée implicitement en solution palliative face à de nouveaux problèmes ». Peneff, op. cit., p. 154.
[7] Antoinette Chauvenet, Vinciane Despret et Jean-Marie Lemaire, Clinique de la reconstruction. Une expérience avec des réfugiés en ex-Yougoslavie. Paris : L’Harmattan, 1996.
[8] Dans l’hypnose, selon Borch-Jakobsen, le pacte d’ignorance prend la forme d’une demande d’inconscience qui traduit le fait que le thérapeute demande au patient d’ignorer la demande. Dans le cadre de la psychologie expérimentale, on pourra évoquer un pacte de double ignorance : le scientifique demande au sujet d’ignorer ce sur quoi porte l’expérience ; le sujet, très souvent, ne l’ignore pas, mais comprend implicitement que le scientifique lui demande de « faire semblant » de l’ignorer. Ce qui mène le scientifique à ignorer que son sujet n’ignore pas. Comme nous l’ont dit nos « sujets » au cours d’une expérience de psychologie que nous avions menée avec Isabelle Stengers : « Nous n’avons jamais cru que vous alliez croire que nous croirions ce que vous nous avez raconté ». Cette expérience a fait l’objet d’un court documentaire reprenant les divers moments de la procédure, y compris les interviews.  The Valins experiment : 1966-1999.  Réalisation D. Demorcy, V. Despret et I. Stengers dans le cadre de l’exposition « Laboratorium » tenue à Anvers en juin 1999.
[9] Op. cit. , p. 42.
[10] Voir à ce sujet V. Despret, Hans, le cheval qui savait compter. Paris : Les Empêcheurs de penser en rond, 2004.
[11] Dembo T (1976) « The dynamic of Anger ». Traduction anglaise de J. De Rivera. In J. De Rivera ed., Field theory as human science. New-York : Gardner Press, pp. 324-422. Je renvoie à l’analyse que j’en ai faite dans Ces émotions qui nous fabriquent. Ethnopsychologie de l’authenticité. Paris : Les Empêcheurs de penser en rond, 1999.
[12] Pour rappel, l’expérience Milgram consistait à faire croire à des sujets qu’ils devaient en électrocuter d’autres dans une expérience d’apprentissage. Voir  Milgram S. (1975)Obedience to Authority. Harper and Row, et lire la passionnante recherche menée auprès des sujets de l’expérience, 40 ans après, par Ian Parker , découvrant à sa grande stupéfaction que nombre de ces sujets avaient compris qu’ils devaient jouer une sorte de jeu de rôle, et « for the sake of science » n’en ont rien laissé paraître ;« Obedience », Granta, 71 (Shrink), oct. 2000 : 101-125.
[13] Cette hypothèse avait déjà été émise par le psychologue Carl Stumpf, collègue de Pfungst, lors d’une première enquête. Le fait que Stumpf ait mené des recherches au sujet de l’hypnose n’est sans doute pas étranger à cette intuition.
[14] On pourrait évidemment envisager, pour rendre compte du contraste, ce que propose Mikkel Borch Jakobsen : lorsqu’il s’agit d’objets simples comme les comportements proches des activités perceptives ou de réflexe, c’est-à-dire des activités qui échappent à la volonté des sujets, l’expérimentateur pourrait se sentir libéré de la menace des attentes. La façon dont Pfungst distribue l’opacité et la visibilité de ses expériences, tout comme la manière dont Wundt envisage le problème, me semblent répondre à d’autres enjeux.
[15] Les informations au sujet de la pratique de Wundt sont issues de Kurt Danziger, Constructing the Subject. Cambridge : Cambridge University Press, 1990.
[16]In T. Nathan et I. Stengers, Médecins et sorciers, Paris : Les Empêcheurs de penser en rond, 1995.
[17] On retrouvera ici l’influence de William James et de son pragmatisme. La Signification de la Vérité. Trad. Collectif DHPI, Lausanne : Antipodes, 1998.

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